mardi 12 mars 2024

Pendant la Révolution et jusqu'en 1833, les écoles de Dinan

 

Une école en 1833 rue de l'Horloge


 

Avant le 19ème siècle, écoles ou collèges ?

 

 

Quand on effectue des recherches sur les écoles au 18ème et au 19ème siècle, il est souvent fréquent de faire des confusions entre les écoles et les collèges. Deux raisons principales à cela : le terme « école » peut être utilisé pour désigner un collège et les établissements secondaires scolarisent des élèves d'âge primaire même si ce n'est pas leur mission principale. Ainsi « l'école » de Dinan, déjà mentionnée en 1435 dans les Comptes du Duché de Bretagne en 1435-1436 :

 

 "Aux enffans de l'escolle du dit lieu de Dinam, du don de mondit

seigneur, à la feste de saint Nicollas derreine passée, 1 escu".

 

Cela signifie que le duc verse 1 écu à la Saint Nicolas pour l'école de Dinan en 1435. Il s'agit d'un compte de dépenses pour l'année citée ; il paie par exemple les Cordeliers, un marchand de Dinan ou diverses personnes pour achat ou service rendu en Bretagne. (0)


 

En 1534 et 1570 dans des archives d'Ille et Vilaine, l'école désigne un établissement qu'on appellerait aujourd'hui d'enseignement secondaire. (1)   

 

Dans un autre document très ancien, on parle de l'un des professeurs, « maistre Jehan David..., parouessien de Plouasne » qui meurt en 1570. Il est qualifié dans son acte de décès de « régent de l'Escolle de Dinan ». (2)

Cet établissement, proche de la porte St Malo, a donné son nom à la rue de l'Ecole. (3)

 

Dirigé par les pères Cordeliers, il eut à subir plusieurs déménagements et connut des périodes de fermeture. Pour les Cordeliers, le terme « école ecclésiastique » est souvent employé au 19ème siècle. 

 

Précisons enfin que les Cordeliers scolarisent pendant longtemps des enfants de primaire. Par exemple en 1882, on y trouve une classe de 42 garçons de 6 à 13 ans.

 

 

 

 

L'autre établissement important, et au destin également contrarié, se situe rue de Léhon. Il est connu aujourd'hui sous le nom de « Collège Roger Vercel ». 

 

Mgr Des Laurents, évêque de St Malo, en est à l'origine. Il fit réparer en 1777 le couvent des bénédictines de Notre Dame de la Victoire et y installa l'école de Dinan qui prit le nom de « Collège Des Laurents ». (4)  

 

Là aussi, le terme « école » est utilisé au même titre que « collège ». On parle également d' « école secondaire ».

Des classes de septième et huitième figurent à différentes époques dans l'organisation du collège (5) mais avec un effectif global réduit. On leur confère malgré tout une réelle importance. (6) 

 

On peut remarquer aussi qu'en 1773, l'école de Dinan s'est installée au 1 rue de la Ferronnerie, dans la maison du père de Charles Duclos-Pinot.

 

Mais de nombreux établissements spécifiques vont se développer indépendamment des collèges, nous nous attacherons à suivre avant tout leur histoire. C'est celle de l'enseignement primaire à Dinan.


 

 

 

Les écoles pendant la période révolutionnaire

 

 

1802, 29 Pluviose an 10, registre municipal page 32. Archives mairie

 

On sait peu de choses sur l'organisation des écoles à Dinan pendant la période de la Révolution. Dans ces années de grands bouleversements, la loi du 17 novembre 1794 donne la possibilité de fonder des écoles particulières. 

 

Un sujet pose problème : la rémunération des maîtres. Dans un premier temps elle est assurée par la République mais rapidement et faute de moyens, on apprend que les deux instituteurs des écoles primaires de Dinan ne reçoivent plus de traitement depuis le 1er vendémiaire de l'an IV (23 septembre 1795). C'est l'application de la loi Daumou. Les instituteurs n'ont pour seules ressources que le logement gratuit et l'argent  versé par les familles qui le peuvent. 

Cette situation prive les enfants pauvres de leçons gratuites et donc de toute instruction.

 

Nous avons aussi quelques descriptions de la participation des écoliers de Dinan pour les célébrations des nouvelles fêtes dans cette période bien particulière. Lors de la fête de la République (an VI), dans le cortège qui défile dans les rues avant de se rendre place de la liberté (du Champ) et de la Concorde (place St Sauveur), on voit les "instituteurs à la tête de leurs élèves tenant en main des rameaux de chêne . A la fête de la souveraineté du peuple an VII, deux élèves du collège portent des bannières décorées de guirlandes, de verdure et de rubans aux trois couleurs et avec des élèves de l'école primaire, ils entourent un ancien militaire chargé de porter les tables de la Constitution. A la fête des vieillards, trois enfants de l'école primaire doivent aller décorer de feuillages la porte des vieillards désignés. (7)

 

 

5 mai 1806. Indemnités des instituteurs. Archives mairie

 

 

5 mai 1806. Archives mairie

 

12 mai 1807. Archives mairie

 

 

 

 

 

L'enseignement primaire à Dinan. 1808-1831

 

 

Nous avons à Dinan en 1808, l'école des frères Lamennais  qui est en activité. (9)   

 

De leur côté,  les sœurs de la Sagesse sont installées depuis 1750-1751 mais sont surtout occupées par  leurs oeuvres charitables et leur premier asile de l'enfance n'ouvrira qu'en 1843 (au numéro 34 de la rue st Charles). (10) 

 

En 1813, une école primaire laïque est rue de l'Horloge. Elle est dirigée par Antoine Picard et son adjoint se nomme François-Xavier Renaud. (11)   

 

En 1816, M.Picard est seul et enseigne à 10 élèves gratuits.(12) 

 

16 février 1816. Délibération du conseil municipal de Dinan

 

 

En 1819, les deux instituteurs touchent 400 francs mais cette somme comprend l'indemnité logement. (13) 

 

En 1817, au sein du collège dirigé par l'abbé Bertier fonctionne une école primaire où on enseigne, à partir de l'alphabet, la lecture et l'écriture. (14) 

 

Des dossiers d'archives de la Ville, concernant les écoles de garçons nous permettent de nommer sommairement le nom des instituteurs de Dinan en 1830-1831. Il s'agit de Picard, Baudet, Leyder, Gauthier (Hamon est décédé) et les Frères.

 

 

Concernant les instituteurs dinannais, le plus ancien dont on connaisse bien l'état civil est Charles Hamon, né à Plédran en 1759 et décédé à Dinan le 11-01-1831 à l'âge de 72 ans (acte ci-dessus). Fils de Joseph Hamon et de Françoise Gicquel, il était veuf  en premier mariage de Laurence Duval et mari de Yvonne-Perrine Lesauvage.

 

Charles Hamon (1759-1831), instituteur à Dinan

 

 

L'autre instituteur de la même époque est Pierre Baudet né à Rethel (Ardennes) en 1763 et décédé à Dinan le 05-12-1838 à l'hospice à l'âge de 75 ans. Il était fils de Pierre et Marie-Hélène Joly et marié avec Michelle-Perrine Ripuel.

 

 

 

 

L'enseignement primaire à Dinan. 1832-1834

 

 

 

Nous en savons un peu plus sur le paysage scolaire en 1832. Nous avons : un collège, un petit séminaire (les Cordeliers) avec comme directeur Julien Bertier, l'école des frères de l'Instruction chrétienne avec 360 élèves, des écoles primaires laïques, M. Gauthier avec 60 élèves au Vieux Couvent (c'est l'ancien couvent des Dominicaines connu sous l'autre nom d'Hôtel Beaumanoir, 1 rue Haute voie) et Antoine Picard, rue de l'Horloge avec 30 élèves, le pensionnat privé de Mme Desguez au n° 4 de la Grande rue, à l'Hôtel de Plouër, les dames de la Sagesse au 34 rue Saint-Charles et enfin les dames Ursulines, rue de Léhon (Mme Piriou, sœur Angèle, est la supérieure).

 

L'école de M. Gauthier, au Vieux Couvent (Hôtel Beaumanoir, 1 rue Haute voie)


 

 

Dans l'enquête réalisée à la demande du ministre Guizot en 1833, on apprend que 627 enfants reçoivent une instruction dans les six principales écoles de la ville, 150 viendraient des communes environnantes. (15)  

 

En 1834, le Conseil est assez fier d'annoncer que tous les enfants susceptibles de recevoir l'instruction primaire sont admis dans les différentes écoles de la ville comme l'avait demandé le ministre Guizot.

 

 

Il faut préciser que le collège s'installe rue de l'Horloge dans la maison dite de l'ancien gouverneur (ou du Vieux gouvernement) entre 1831 et 1833. (16)   

 

C'est dans la maison du 11 rue de l'horloge que s'installera l'école communale au départ du collège

 

Ecole au 11 rue de l'horloge à Dinan. Photo RF

 

 

Le local n'est pas en très bon état comme en témoigne ce document « 1831. Réparation au 6 rue de l'Horloge. Maison Moisan (Ce numéro deviendra par la suite le 11 rue de l'Horloge):  « La maison de M. Moisan a été louée par la ville de Dinan le 18 mars 1831 pour l'installation provisoire de son collège pour 3 ans à partir de la Saint Jean Baptiste 1831 ; Sous les conditions suivantes qu' une somme de 300 francs serait employée la première année en réparations à la maison sur le prix du loyer de la première année et celle de cent francs seulement pour le même objet chacune des années suivantes » (archives municipales).

 

 

Mentionnons encore dans cette période ce livre de 1828 intitulé « Alphabet syllabique et français ou Méthode ingénieuse et facile pour apprendre à lire en peu de temps ». Cet ouvrage est imprimé à 1000 exemplaires par Jean-Baptiste Huart dans ses locaux de rue de l'Horloge. Il totalise plus d'une centaine de pages. Cette méthode se veut « Très utile à la jeunesse, tant pour la lecture que pour la bonne orthographe, et très soulageante pour les Instituteurs et Institutrices ». On y trouve quelques pages avec des modèles de lettres, une étude des sons, des syllabes ; des pages de prières découpées par syllabes ; dans le reste du livre il est surtout question de prières, de conseils pour avoir une vie pieuse, à la maison, à l'école en classe ou en récréation. Enfin, les aventures de Bertrand Têtu et de petits dialogues entre le maître et son élève permettent de préparer quelques séances. (17)  



Si vous avez des éléments pour compléter cet article  (photos, témoignages...) merci d'utiliser le formulaire de contact en haut à droite...
 

 

 

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Sources


0. Document transmis par Yvon Le Corre en avril 2022. Texte page 108, (48), cliquer ici

 

1. Elie Gautier, « L'école des Cordeliers de Dinan »

 

2. Registre paroissial de Saint Malo du 8 avril 1570, cité par Bellier-Dumain « Histoire du collège »

 

3. Sur son emplacement a été construit vers 1900 un immeuble dans lequel s'est installé la banque Bazin puis la banque Gilbert et compagnie en 1926. D'après une note manuscrite de M.Bellier Dumaine, exemplaire offert à la Bibliothèque de Dinan, page 10)

 

4.« L'école des Cordeliers de Dinan » Elie Gautier, édité chez Jean Collet,  1986.

 

5. Annuaire des Côtes-du-Nord 1836. Nous notons que Dinan possédait l'un des six collèges du département avant la Révolution avec St Brieuc, Lannion, Tréguier, Guingamp et Plougernevel.

 

6. Bellier-Dumain, histoire du collège page 118. M. Joubin, principal du collège en 1838 n'hésite pas à se charger des classes l'enseignement élémentaire quand le personnel est incomplet ou insuffisant.

 

7. Bellier-Dumaine, histoire du collège p70, 71

 

8. Jacques Opportune Sergent est né à Châteaudun le 22 avril 1765.Bellier Dumaine en parle dans son histoire du Collège  page 66. Il nous dit qu'il est apprécié :  « réuni à une pratique très éclairée une théorie très profonde » archives municipales, registre de correspondances du district, 1er oct 1791. Avant son arrivée à Dinan il « avait servi comme instituteur particulier pour les mathématiques, la levée des plans et le dessin à la carte pendant cinq ans à MM les officiers du corps royal de l'artillerie, régiment de Besançon, archives nationales F.17 2835. Voir aussi l'article d'Alexis Cordier dans le Pays de Dinan 1996.

 

9. Histoire et panorama d'un beau pays, Bertrand Robidou.

 

10. Chalopin Michel. L'enseignement mutuel en Bretagne de 1815 à 1850, page 84 ... Par contre, à Rennes, beaucoup plus tôt, en 1807 elles avaient acquis une maison d'éducation et scolarisaient  72 filles en 1816.

 

11. Archives départementales 1T56).

 

12. Archives mairie, délibérations du Conseil, 16 février.

 

13. Archives mairie, délibérations du Conseil, 15 mai). 

 

14. Rapport de l'inspecteur d'Académie, archives nationales E.17H 4385, cité par Bellier Dumaine p 90

 

15. Conseil municipal du 26 décembre 1833.

 

16. Histoire du collège, Roger Faure

 

17. Disponible pour consultation à partir du site Galica de la Bibliothèque Nationale de France

 

 

Pour en savoir plus : 3 dossiers

 
1. Accès aux documents des archives municipales de Dinan sur les premières écoles laïques de 1802 à 1819, cliquer ici


2. Jusqu'en 1833, peu de renseignements sur les instituteurs mais le plus ancien dont on connaisse bien l'état civil est Charles Hamon, né à Plédran en 1759 et décédé à Dinan le 11-01-1831 à l'âge de 72 ans. Fils de Joseph Hamon et de Françoise Gicquel. Il était veuf  en premier mariage de Laurence Duval et mari de Yvonne-Perrine Lesauvage.

Lien pour consulter un document de l'état civil de Dinan sur Charles Hamon, cliquer ici

 

3. L'autre instituteur de la même époque est Pierre Baudet né à Rethel (Ardennes) en 1763 et décédé à Dinan le 05-12-1838 à l'hospice à l'âge de 75 ans. Il était fils de Pierre et Marie-Hélène Joly et marié avec Michelle-Perrine Ripuel.

Lien pour consulter un document de l'état civil de Dinan sur Pierre Baudet, cliquer ici



En 1830, M.Gauthier dirige une école dans le Vieux Couvent (Hôtel Beaumanoir) Dinan
(photo R.Fortat)

 

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